
Crédits photo : hôtel Aman du Péloponèse
Le bien-être devient-il la nouvelle tyrannie ?
Le site du Figaro Magazine a publié cette semaine un article qui nous interroge sur cette obsession du bien-être physique et moral que nous pouvons constater tous les jours.
Depuis quelques années tout passe par le bien bien-être. Une sorte de nouvelle image de l’homme – et encore plus de la femme – idéal s’est construite.
La tyrannie du poids est progressivement et insidieusement remplacée par celle du « fitness ». Ce terme a pour signification d’origine « the condition of being physically fit and healthy ». Une condition physique convenable, adaptée et en pleine santé. Nous devons tous être en pleine possession de nos moyens physiques, sportifs et en pleine forme.
Dans un premier temps, nous pourrions considérer cela comme une émulation saine et propice à élever le niveau général de santé de notre société contemporaine. Malheureusement, les dérives sont nombreuses.
Aujourd’hui, ce n’est plus le collègue enveloppé ni celui qui a du mal à faire son job qui est regardé de travers. Mais c’est celui qui ne participe pas au jogging de l’équipe ou qui abandonne avant la fin, car il n’a pas la condition physique : ce n’est pas un champion ni un gagnant.
Dans leur livre, Carl Cederström et André Spicer nous donnent des exemples concrets de situations de discriminantes. Des discriminations qui ne s’arrêtent pas qu’aux aptitudes physiques mais s’attaques également à notre état mental et affectif.
En effet, à la tyrannie de la forme physique vient s’ajouter celle du bonheur. Le bonheur n’est plus une recherche personnelle, une quête, ni un mode de vie choisi. Le bonheur, comme le bien-être, est devenu une injonction, une obligation sociale. Nous devons être heureux, quoi qu’il arrive, et le montrer !
Question d’éthique ?
J’ai déjà abordé de thème de l’injonction du bonheur au travers de différents articles dont le dernier date d’il y à peine un mois. Pourtant, aujourd’hui, se pose une question différente : quel rôle jouons-nous dans cette évolution ?
En effet, nous revient-il d’inciter à une prise de recul et une réflexion sur cette quête forcée du bonheur que nous retrouvons chez certains de nos patients ?
Avons-nous une obligation d’aider à prendre conscience de l’importance de TOUS les ressentis, y compris la tristesse, dans la construction de soi ?
Ou bien, devons-nous simplement répondre aux attentes, aux demandes, et délivrer un acte technique ? Sans nous soucier du contexte dans lequel il s’applique ni du fait qu’il n’apportera rien sur le long terme ?
Par ailleurs, Est-ce possible ? Est-ce compatible avec les notions de réalité objective et d’action positive qui sont parmi les piliers de la sophrologie ?
Pour moi, la réponse est non. Mais c’est à chaque sophrologue de se poser la question quand le cas se présente.
Le bien-être, jusqu’où ? – Par Emilie Veyretout
Cures extrêmes pour dépolluer ses cellules, culte de l’alimentation « healthy », obsession de la pensée positive… En France comme ailleurs, le « wellness » peut rendre accro. Y a-t-il du mal à se faire trop de bien ?
Cet été, pendant que certains lézardaient sur la plage du Pouliquen après un déjeuner arrosé en pensant à ce qu’ils allaient dîner, d’autres enchaînaient, à des milliers de kilomètres, leur deuxième séance de yoga de la journée, après une heure de méditation à l’aube et un breakfast sommaire – voire un simple jus d’herbe. L’idée peut faire sourire? À condition de ne pas être du genre à culpabiliser.
Car l’obsession grandissante pour la transformation de soi est en train de remodeler nos sociétés. Surtout, circonscrit dans les années 1970 à une poignée de communautés New Age, le wellness est devenu dans la plupart des pays occidentaux un impératif moral, qui se pose à chacun. «Être quelqu’un de bien implique de trouver sans cesse de nouvelles sources de plaisir et de nouveaux moyens d’augmenter notre bien-être, dénoncent les chercheurs Carl Cederström et André Spicer, auteurs du Syndrome du bien-être paru récemment sur le sujet (Éditions L’Échappée). Heureusement pour nous, les entreprises se dotent de salles de sport flambant neuves pour nous encourager à nous maintenir en forme ; la société de consommation s’engage à faire notre bonheur en pourvoyant à nos moindres besoins ; les centres de yoga ouvrent leurs portes pour nous aider à trouver l’harmonie et la paix intérieure ; et il est même scientifiquement prouvé que faire la vaisselle ou préparer nous-mêmes notre pain nous rendraient plus zen et plus détendus au quotidien. Cette logique est désormais partout à l’œuvre, dictant aussi bien notre façon de travailler et de vivre que d’étudier et de faire l’amour.»
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Voilà une problématique que je rencontre tous les jours dans ma pratique (Sophrologue spécialisée dans les troubles du comportement alimentaire, le surpoids et l’obésité).
Comment passer d’un corps que je contrains, que je soumets, d’un corps rêvé au regard des images, diktats ou tyrannies publicitaires à un corps vécu… Avoir un corps ou être son corps ?
La question n’est-elle pas plutôt : comment revenir d’un corps rêvé et magnifier, à un corps vécu et accepté ?
Je crois que ce qui me semble important, c’est de trouver la juste mesure, entre ce qui nous semble juste et réalisable, et ce qui peut être considérer comme de la tyrannie.
Notre rôle, me semble t il est d’apporter à nos clients ou nos patients, les techniques qui leur permettent de reprendre la main sur leur vie et sur eux mêmes. Il est celui qui doit accompagner par rapport aux demandes et résister à l’engouement d’une « mode ». Dans tous les domaines, dans toutes les société occidentales, le mot respire et devenu un rituel. Nous le savons cela ne suffit pas. Chacun a sa propre vision, gardons de vue que nous ne sommes les « gourous » de personne surtout dans ce monde si perturbé. Peut être sommes nous plutôt les garants, les paravents de ces mouvements d’idée comme quoi « le bonheur » s’est obligatoire, sinon tu es has been. Mieux vaut l’être et ne pas être l’esclave volontaire ou pas d’une mode, d’une période, qui s’achète et se jette.
Oui Florent Ascensio, mais ce cheminement est un cheminement personnel et volontaire, par contraint. Hors cet article rejoint un sentiment que j’ai depuis quelques temps : cela devient une mode. Après les années fric, viennent les années santé & bonheur obligatoires pour tous. Ce qui n’est pas sans poser quelques questions comme celles soulevées dans mon commentaire.
après la révolution industrielle, pourquoi pas la révolution humaine :) . les magazines n’ont pas forcement les même intentions de « bien être » quand ils en parlent. On a toujours le choix d’être contraint ou pas :) de subir ou pas.
Aller à la rencontre de soi et faire ce qui est bon pour soi,voila l’utilité juste du mieux être, peut importe les méthodes, les modes. :)
Bonne question
Article lu.
Désolé Adrien, j’ai eu un petit problème technique ce matin et il avait disparu du fil.
Je suis curieuse d’avoir votre avis sur le fond.
Sur le fond, Sabine, il suffit de voir le traitement de cette tyrannie du bien être par les revues populaires et populistes pour comprendre qu’il ne s’agit aucunement d’une démarche d’évolution intérieure qui se joue dans le developpement du marché du bien être.
C’est au contraire une démarche d’asservissement béât à des principes de marketing de soi que les Américains utilisent depuis les années 50, à partir de première thérapies comportementales de Skinner. Etre en forme, sourire, respirer la santé… pour vendre et se vendre. Un style de vie positif visant à se faire accepter par autrui.
La démarche de la sophrologie comme art de la conscience n’est pas de vendre à tout prix du bien-être, mais de pressentir la sérénité, voire la joie d’être, comme finalité d’une démarche d’acceptation de son vécu et des situations dans une attitude sans jugement. C’est pour cela que pour moi elle ne peut absolument pas être disjointe d’une démarche de philosophie pratique.
C’était en tout cas la démarche de l’ensemble de la sophrologie française, avec la psychanalyse en plus, quand je l’ai découverte dans les années 80.